Caroline Vignal s’interroge sur la quête du plaisir 2.0

Vincent Elbaz et Laure Calamy, un couple plus tout à fait sur la même longueur d'onde. Photo Chapka Films.

Trois ans après avoir emmené Laure Calamy vers un César grâce à son road trip en pleine nature lors du film Antoinette dans les Cévennes, la réalisatrice Caroline Vignal a, de nouveau, fait appel à son actrice fétiche pour une immersion dans un monde qui lui est également totalement inconnu : la jungle des applications de rencontres.

Iris et les hommes, une comédie joyeuse et légère où l’on suit la quête du plaisir 2.0 initiée par Iris (Laure Calamy) quadragénaire ayant réussi sa vie professionnelle (elle est dentiste dans un cabinet qui tourne bien) et sa vie de famille (mariée, mère de deux jeunes filles) mais qui souffre, en silence, du désert sexuel qui s’est instauré depuis des années au sein de son couple.

Les applications de rencontre vont-elles lui permettre de trouver l’épanouissement physique et psychologique qu’elle recherche ?

«  L’idée de ce film est venue au moment où je cherchais les financements d’Antoinette dans les Cévennes, confie Caroline Vignal. J’avais mis 20 ans à faire un deuxième film et je ne voulais pas que ça recommence, je savais que lorsque l’on en finit un, c’est comme un accouchement, on est exsangue et qu’il vaut donc mieux ne pas repartir de zéro. C’est suite à une soirée avec une amie qui n’avait selon moi pas du tout le profil pour aller sur les sites de rencontres et qui m’avait raconté comment ça se passait. J’ai voulu aller voir par curiosité mais il y avait une obligation de s’inscrire. Je l’ai donc fait et comme le personnage d’Iris, j’ai reçu plein de « like » et de messages. J’ai tout compilé, j’ai des amies qui s’y sont mises et qui me faisaient aussi suivre leurs messages. »

Le nom de Laure Calamy lui est tout de suite revenue en tête : « Laure n’est pas du tout Iris dans la vraie vie, c’est un rôle de composition mais comme j’allais raconter l’histoire d’un point de vue unique, j’avais besoin de m’identifier à la personne qui allait incarner ce personnage. Et j’avais envie de donner à Laure ce rôle de bourgeoise, de femme accomplie, qu’on ne lui donnait pas jusque-là. Elle a un génie comique mais aussi une palette de jeu incroyable, capable d’amener toutes les émotions et elle est très charnelle, elle allie tout ce dont j’avais besoin pour Iris. »

Le casting de son mari Stéphane (Vincent Elbaz) fut plus complexe : « J’avais envie que le mari renforce le mystère, qu’il soit a priori parfait et qu’on s’interroge davantage. C’est un peu comme ces couples que l’on connaît tous, que l’on envie tant ils semblent unis en apparence et qui finissent par se séparer sans que l’on sache vraiment pourquoi », indique-t-elle.

La réalisatrice reconnaît avoir aussi volontairement écarté l’idée d’un film plus dramatique avec une rencontre qui se passerait mal. « J’avais clairement envie de faire une comédie même si ce qu’on comprend du personnage d’Iris et de ce que risque ce couple n’est pas si joyeux que ça mais j’ai toujours l’espoir que la comédie me permette de dire des choses à un public qui n’est pas forcément de mon avis et que ça passe beaucoup mieux. »

Porté par une Laure Calamy lumineuse et de très bons seconds rôles (Suzanne de Baecque et Laurent Poitrenaux), Iris et les hommes ne porte pas de jugements définitifs, ni même de réflexions poussées sur les utilisateurs de ces sites de rencontres mais le film permet de passer un moment agréable. Comme les applis ?

« Iris et les hommes », déjà en salle. Comédie réalisée par Caroline Vignal avec Laure Calamy et Vincent Elbaz.

Photo Chapka films.

Quand Joachim Lafosse interroge le silence, ça fait du bruit dans les consciences

Daniel Auteuil et Emmanuelle Devos forment un duo impeccable dans ce nouveau film de joachim Lafosse. Photo Films du Losange.

C’est le film coup de poing de ce début d’année 2024 et ce n’est pas une surprise qu’il soit signé Joachim Lafosse. Le réalisateur belge n’est pas du genre à se défiler à l’heure de s’attaquer à des sujets sensibles. Il l’a déjà prouvé avec Élève libre (2008) et Les intranquilles (2021).

Cette fois avec Un silence, il s’inspire d’un fait divers qui a touché la Belgique, pour emmener son public en immersion au coeur d’une famille bourgeoise où Astrid (Emmanuelle Devos) et son mari, le célèbre avocat François Schaar (Daniel Auteuil), spécialiste de pédocriminalité, vont voir leur quotidien basculer dans le drame lorsque leurs enfants se mettent en quête de justice.

Le parti pris du réalisateur est très clair : « Je n’ai pas voulu donner ma vérité sur cette affaire mais évoquer cette honte, cette culpabilité et ce silence qu’elles engendrent chez les victimes comme chez les témoins. Quels sont les effets de ce silence ? Qu’est-ce qui a fabriqué ce silence ? Le film est écrit pour la défense de l’adolescent mais aussi celle de sa mère car elle est aussi une victime, elle n’a jamais demandé à ce que ce crime ait lieu. J’avais la préoccupation de garder un lien empathique du spectateur envers ce personnage qui a un silence si grave. »

Même si l’installation de l’histoire dans la première partie du film peut donner quelques sensations de longueur, Joachim Lafosse parvient rapidement à instaurer une atmosphère glaçante en s’appuyant sur l’immense talent de ses comédiens et notamment du duo Emmanuelle Devos-Daniel Auteuil.

Impeccable dans ce personnage de monstre à sang froid, habile manipulateur, le comédien a accepté un défi que beaucoup d’autres ont refusé avant lui : « Il a été très courageux. 5 ou 6 grands acteurs français m’ont dit que le scénario était très chouette, mais que le film y gagnerait plus qu’eux à ce qu’ils jouent dedans, avoue le réalisateur. Daniel, lui, ne s’est pas posé la question une seconde. Il voyait les nuances à donner à ce personnage. Il était soucieux de la manière dont on allait pouvoir garder une empathie du public envers Astrid, ça disait pourquoi il était là. Son souhait était de faire un film sur l’horreur que représente ce genre de situation. »

Emmanuelle Devos reconnaît, pour sa part, avoir mis un peu de temps à accepter : « J’avais reçu un premier scénario, je trouvais le thème intéressant mais je ne m’y voyais pas. Et puis après beaucoup d’échanges avec le scénariste, la lecture du scénario définitif, je me sentais davantage de le faire et j’ai fini par être totalement convaincue. Le silence dans les familles, ça m’intéresse depuis longtemps. En parlant autour de soi, on découvre que des cadavres dans les placards, il y en partout, dans toutes les familles, dans tous les pays, dans toutes les religions. »

Et puis il y a l’acteur inattendu de ce film : le silence, un personnage à lui tout seul, omniprésent, oppressant. L’une des forces de Joachim Lafosse est d’avoir su donner plus de puissances aux non dits qu’à des mots. «  Ce qui est intéressant, c’est qu’il n’y a justement pas de silence dans la maison. Tout le monde parle et c’est en ce sens que cette famille est criminelle, elle autorise le crime, elle ne l’interdit pas. Cette manière qu’à le personnage de l’avocat, en éblouissant de sa lumière l’extérieur, de se cacher, au point d’amener les victimes, dont il dépend , à lui, quand il est lui-même accusé. C’est ce qu’il a réussi à faire avec Astrid : une femme qui est fière de l’aider. C’est du génie pervers. La perversion c’est sa logique défensive, je pense que le personnage de François n’a malheureusement pas accès à la honte sinon il s’effondrerait tandis que la logique défensive d’Astrid est le déni, tout aussi dévastateur. Le déni n’est pas un choix, c’est inconscient et tous les spécialistes vous diront que c’est très difficile de sortir quelqu’un du déni. Pour parler, il faut être solide, bien accompagné, dans une estime de soi suffisante, être capable de tenir face à ce qu’on va perdre. Astrid n’a pas ces ressources. »

Envisagé il y a déjà sept ans, ce film n’avait pas pu se faire à l’époque, les producteurs jugeant le sujet trop dur. Depuis la libération de la parole a avancé et a sans doute permis de faire éclore ce film avec l’espoir pour son auteur de continuer à faire évoluer les pratiques. « Aujourd’hui quand les femmes parlent, il y a une solidarité magnifique. Quand les hommes parlent, ils restent le plus souvent isolés, il n’y a pas de sororité masculine. Si les hommes évoluent et se dévirilisent, il serait temps qu’ils soutiennent ceux qui parlent. »

Un silence. En salle depuis le 10 janvier, réalisé par Joachim Lafosse avec Emmanuelle Devos, Daniel Auteuil, Jeanne Cherhal et Matthieu Galoux.

Photo Films du Losange.

Olivier Delacroix, maître confesseur dans le respect et la bienveillance

Olivier Delacroix est aujourd'hui l'un des meilleurs pour recueillir des confidences sans tomber dans le voyeurisme. Photo France Télévisions

Déjà douze saisons pour l’émission Dans les yeux d’Olivier qui revient ce mercredi soir (22 h 55) sur France 2 avec un thème fort : «Enfants : les victimes oubliées des violences conjugales » Comme d’habitude, Olivier Delacroix réussit le tour de force de recueillir des confidences bouleversantes en prenant toujours garde de ne pas sombrer dans le pathos et encore moins dans le voyeurisme. Touché lui-même par plusieurs drames dans sa vie, l’animateur est bien placé pour savoir où pointer le curseur.

« On passe deux ou trois jours avec nos témoins et au début je les rencontre sans tourner. J’ai la volonté d’être vierge, je connais les grandes lignes de l’histoire mais pas plus, j’aime bien creuser, précise-t-il. On instaure une confiance telle que certains témoins vont très loin dans la confession. À nous de ne pas dépasser les frontières, il y a des choses qui doivent rester dans leur jardin à eux. D’ailleurs, vous remarquerez qu’on voit rarement les gens pleurer, c’est une recette pour nombre d’émissions mais, nous, ce n’est pas dans notre ligne. »

Comme chaque saison, Olivier Delacroix et son équipe ont sélectionné des sujets sociétaux comme les erreurs médicales, la possibilité d’échapper ou non à son milieu, les agriculteurs, les blessures du passé… Ils recueillent les témoignages d’anonymes mêlés à ceux de personnalités comme Cindy Bruna, Chris Marques ou Jérémy Ferrari. « C’est plus dur avec les personnalités car elles ont moins de spontanéité. Quand on est exposés, on réfléchit plus à ce que l’on dit mais je crois que la confiance dans le programme s’installe au fil du temps même si on essuie encore beaucoup de refus. »

« Je me suis posé la question d’accepter ou pas, avoue Chris Marques, victime d’erreurs médicales. C’est une période de ma vie dont je n’aime pas parler mais je me suis senti tellement seul et incompris à l’époque que je me suis dit que c’était important d’en parler pour aider ceux qui sont en plein dedans et aussi les rassurer en mettant en avant le fait que je m’en suis sorti. »

Olivier Delacroix aimerait, bien sûr, encore mettre en lumière de nombreux thèmes difficiles comme les enfants placés, le suicide d’un proche, la perte d’un enfant mais le confesseur avoue déjà se nourrir humainement à chaque tournage : « On fait 22 à 24 minutes sur chaque témoin, ça permet d’aller en profondeur. On sait que ça peut changer le regard des autres sur eux et on les prévient donc de cette nouvelle réalité. »

« Dans les yeux d’Olivier », dès ce mercredi 10 janvier (22 h 55) sur France 2.

Un avant-goût du festival d’Angoulême en gare Lille Europe

Des planches de Kaiju 8 ont investi les façades extérieures des halls de la gare Lille Europe. Photo David Paquin

Si vous êtes passés ces derniers jours devant la gare Lille Europe, votre regard a forcément été attiré par de drôles de créatures tout droit issues de l’imaginaire de Naoya Matsumoto, autrice de manga, et de son ouvrage Kaiju n°8. Un succès colossal au Japon, où il a dépassé le million d’exemplaires vendus, mais aussi en France avec plus de 20 000 ventes dès la première semaine.

Une exposition qui s’inscrit dans le cadre des manifestations culturelles organisées régulièrement par la SNCF, sous des formes variés, les expositions grands formats de photos, œuvres d’art se prêtant particulièrement aux grandes vitre des halles.

« Un accord existe depuis quelques années avec le festival international de la bande dessinée d’Angoulême. Tout est centralisé par la direction des affaires culturelles et ensuite les œuvres sont disséminés dans les gares impliquées dans l’opération. Là, le choix du manga a été fait pour Lille Europe mais ailleurs il y a d’autres choses, tous les genres de la BD sont représentés », explique Christophe Rioux, enseignant-chercheur, spécialiste des questions culturelles à Sciences Po Paris, qui accompagne souvent la direction des affaires culturelles de la SNCF sur ce type d’opération.

Un livre sur 4 vendu aujourd’hui étant une BD et la moitié des BD achetées étant des mangas, l’exposition connaît un franc succès et attire un public jeune et pas seulement les voyageurs.

Photo David Paquin

Un nouveau souffle bénéfique pour « Plus belle la vie, encore plus belle » selon Marie Hennerez 

La Villeneuvoise Marie Hennerez a retrouvé son rôle dans "Plus belle la vie, encore plus belle". Photo CAPA PICTURES

Bonne nouvelle pour ceux qui ont suivi pendant dix-huit années sur France 3, les aventures des personnages du quartier du Mistral, comme pour ceux qui sont totalement passés à côté de la série Plus belle la vie, tous pourront suivre dès ce lundi 8 janvier à 13 h 40, l’adaptation réalisée par TF1 et renommée Plus belle la vie, encore plus belle.

Les réalisateurs ont fait en sorte que les fans comme les nouveaux venus y trouvent leur compte, le premier épisode ce lundi étant bien un numéro 1 mais le passé des personnages sera pris en compte dans les intrigues des uns et des autres.

Le casting compte bien quelques nouveaux visages mais de nombreux historiques ont accepté de revenir. Parmi eux, la Villeneuvoise Marie Hennerez, qui incarne Léa Nebout, adjointe au maire, médecin, mère de deux enfants, et qui vit avec Jean-Paul Boher. Le retour de la série a été pour elle une incroyable nouvelle : « On avait bien fait notre deuil, j’étais passée à autre chose, j’avais donné naissance à mon fils et je le déposais d’ailleurs à la crèche quand j’ai reçu un appel de la productrice Clémentine Planchon, explique-t-elle. Je l’ai rappelée, elle m’a annoncé l’adaptation de la série par TF1, ça me semblait lunaire mais j’ai dit oui très vite. J’étais sans travail à l’époque, les tournages me manquaient et j’ai vite su que TF1 y croyait et voulait mettre les moyens. Il a fallu quelques mois pour que tout se mette en place mais c’était génial de retrouver les personnages, les costumes… »

Les décors, eux, sont un peu différents : « L’intrigue de l’adaptation démarre un an après les derniers événements. Il y a eu un effondrement du quartier du Mistral. Tout le monde en est sorti indemne mais il a fallu reconstruire sur une autre place », explique celle dont le personnage est désormais médecin dans le privé.

Reste à voir comment le public suivra avec un nouvel horaire juste après le journal de 13 h : « On a hâte de voir. Beaucoup de choses sont réunies pour que ça fonctionne, il y a du très bon matériel, la qualité de l’image a été améliorée, ils ont écrit des histoires chouettes avec de l’humain, du citoyen…. Il y a un nouveau souffle très bénéfique pour la série », estime Marie Hannerez qui a repris un rythme intense avec des voyages entre Paris et Marseille et quelques passages réguliers dans son Nord natal pour voir la famille.

La comédienne doit aussi composer avec son emploi du temps au théâtre avec une pièce, Ce qu’il faudra laisser aux anges, qu’elle va jouer en alternance avec d’autres actrices le dimanche à 21 h, à partir du 21 janvier, mais aussi quelques concerts avec Flair, un quatuor vocal aux influences jazz, créé avec quelques amies.

« Plus belle la vie, encore plus belle », à partir de ce lundi 8 janvier (13 h 40) sur TF1.

Photo Capa Pictures.