Lilia Benchabane et le super pouvoir de l’autodérision

L'humoriste Lilia Benchabane a fait de l'autodérision sa force. Photo Pascal Ito
Humour noir au programme avec Lilia Benchabane. Photo Pascal Ito

« Attention handicapée méchante », le simple titre du spectacle de Lilia Benchabane donne tout de suite le ton d’une soirée placée sous le signe de l’humour noir. «  Le but c’est de bousculer un peu les gens, c’est parfois un peu « touchy » mais c’est drôle, enfin du moins je l’espère », sourit la jeune humoriste, atteinte d’un albinisme occulo-cutané qui lui blanchit la peau, blondit ses cheveux mais surtout trouble très sérieusement son acuité visuelle au point de la rendre quasiment aveugle.

Loin de s’apitoyer sur son sort, Lilia Benchabane a décidé de se construire un avenir dans le milieu artistique et après avoir achevé l’an passé ses études, un Masters d’économie à Lille, elle vit, depuis, pleinement de sa passion. « J’ai désormais la possibilité de jouer beaucoup plus souvent. Et puis si ma priorité c’est ce spectacle qui est mon bébé, j’ai d’autres activités, précise-t-elle. Je fais aussi des chroniques en radio sur France Inter, j’ai tournée dans une série « Les chroniques du charbon », produite et actuellement diffusée par la RTBF en Belgique. J’ai également des projets avec France Télévision et entre deux, je poste des vidéos sur les réseaux sociaux donc tout ça occupe bien mon temps. »

Régulièrement sur scène à Paris ces derniers mois, Lilia Benchabanne entamera même une tournée nationale à partir de septembre et son passage ce vendredi soir au Spotlight sonne presque comme une évidence : « C’est toujours un plaisir de revenir jouer ici, c’est quasiment ma maison. J’ai fait mes études à Lille et c’est quand même dans cette salle que je suis venue tester mes blagues », rappelle-t-elle.

Un spectacle qui tourne depuis maintenant un an et qu’elle défendra aussi ces prochaines semaines au Festival d’Avignon. Un joli chemin parcouru depuis les premières vannes balancées au lycée devant des camarades de classe, qui furent sans le savoir, alors, son premier public. « L’autodérision est un super pouvoir pour aider à s’accepter quand on a un handicap », poursuit-elle. Le public adhère, le monde artistique aussi. Lilia Benchabane semble bien partie pour réussir son pari et se frayer un chemin dans la jungle de l’humour.

 

« Attention handicapée méchante », Lilia Benchabane, ce vendredi 30 juin (21 h) au Spotlight à Lille.

 

Elisa Tovati réussit l’alliance de ses deux passions

Elisa Tovati allie ses deux passions. Photo Sandra Fourqui.
Elisa Tovati allie ses deux passions. Photo Sandra Fourqui.

On a tous des chansons qui ont accompagné nos vies, que l’on relie à différents événements heureux, festifs, émouvants ou tristes. En se promenant sur la plage de Cabourg, il y a quelques années, la comédienne et chanteuse Elisa Tovati a commencé à fredonner « chabadabada, chabadaba… », la musique tirée du film « Un homme et une femme » de Claude Lelouch. « ça a été le déclic, sourit-elle. On m’a souvent dit que j’étais assise entre deux chaises, entre ma passion pour la musique et celle pour le cinéma. J’ai alors pensé que ça pourrait être sympa d’aller chercher mes madeleines de Proust, les musiques de mes films cultes. »

Le plus dur fut évidemment de faire une sélection pour n’en retenir que dix-sept : « J’ai mis un temps infini à choisir, ça a été un vrai casse-tête, avoue-t-elle. Je rêve tellement que l’album fonctionne pour pouvoir faire un tome 2. »

Dans cet opus, réalisé par Régis Ceccarelli, avec le label Jo and Co, Elisa Tovati a cherché à varier les films populaires et les films d’auteurs et à réserver quelques surprises en optant, par exemple, pour la reprise de Top Gun, « Le bleu des regrets » qu’avait sortie à l’époque Gérard Lenorman ; pour « la version dingue » de Mireille Mathieu de « Love Story » ou encore en optant pour une variation en Français de « Alabina », l’une des musiques phares du film « La vérité si je mens », où l’actrice avait gagné une vraie notoriété populaire grâce à son personnage de Chochana Boutboul.

« Je ne voulais pas me contenter de faire du copier-coller, j’avais envie de surprendre les gens, qu’ils prennent plaisir à redécouvrir certains titres », précise-t-elle. Parmi ses incontournables, « La chanson d’Hélène » tirée du film « Les choses de la vie » de Claude Sautet, qu’elle a repris dans un duo avec Marc Lavoine : « C’est ma chanson préférée, elle m’a beaucoup marquée et, en plus, elle était interprétée par mon idole Romy Schneider », précise-t-elle.

D ‘autres titres font échos à ses émois d’adolescentes comme « Reality », la chanson culte de « La Boum » ou encore « Diabolo Menthe » d’Yves Simon. Certains mêlent vie privée et vie professionnelle comme « Elisa » : « Je me suis appelée Elisa grâce à la chanson de Gainsbourg, confie-t-elle. Et l’un de mes premiers castings au cinéma a été pour le « Elisa » de Jean Becker avec Vanessa Paradis. J’étais allée assez loin même si je n’avais finalement pas été prise. C’est une aventure qui avait compté pour moi. »

Alors forcément à l’écouter parler, on se dit qu’Elisa Tovati pourrait bien apparaître un jour dans une comédie musicale : « J’adorerai réunir la comédienne et la chanteuse, acquiesce-t-elle. J’attends le bon projet. »

Dès la rentrée, elle reprendra aussi les rendez-vous et les castings pour le cinéma et le théâtre. « Je voulais avant me permettre cette parenthèse, me donner une année pleine pour bien faire cet album et le promouvoir car je le porte dans mon coeur depuis trois ans », indique-t-elle, enthousiaste à l’idée d’aller défendre ces chansons sur scène, sans doute en 2024, dans une tournée qui devrait s’intituler « Elisa se donne en spectacle. »

« Elisa fait son cinéma ». Label Jo and Co.

 

Julien Alluguette : « Ma vie ressemble à une partie de Tetris géante »

Planète Lille a décidé d’aller régulièrement à la rencontre de comédien(ne)s qui tiennent des rôles récurrents dans différentes séries télévisées pour évoquer leur personnage mais aussi leur parcours et leurs différentes actualités. On ouvre le bal aujourd’hui avec Julien Alluguette, le fameux chef pâtissier Zacharie Landiras de la série « Ici tout commence », diffusé quotidiennement du lundi au vendredi vers 18 h 30 sur TF1.

Rencontrer Julien Alluguette est déjà une chance dans la mesure où le jeune homme multiplie les projets. Outre les tournages de « Ici tout commence », il travaille à la mise en scène d’une nouvelle version du « Soldat Rose », dont les répétitions commenceront en août, et qui sera joué à partir du 20 octobre au Grand Rex.

En attendant, il sera ces prochaines semaines au Festival d’Avignon, à la fois pour jouer dans « La vie est une fête » de Lilian Lloyd mais aussi pour la pièce « Les marchands d’étoiles » d’Anthony Michineau, dont il assure, cette fois, la mise en scène.

« La vie est une fête est une pièce très humaine. L’an passé, nous étions assez vulnérables lors de sa création car on ne savait pas quel serait l’accueil mais ça a finalement été un très beau succès et j’ai même reçu le prix du meilleur acteur du Festival d’Avignon, rappelle-t-il. On est plus sereins cette année, d’autant qu’on va enchaîner avec une tournée en France et même quelques dates aux USA, notamment  à San Francisco. »

 Dans « La vie est une fête », Julien Alluguette incarne Romain, « un personnage que l’on suit de sa naissance jusqu’à un événement marquant de son existence. On l’accompagne dans sa découverte du monde, où sa petite histoire rentre en connexion avec la grande Histoire. ça parle d’engagement, de savoir se revendiquer dans ce que l’on est profondément ; c’est une vraie ode à la vie. Et Virginie Lemoine ne se contente plus seulement de mettre en scène, elle va aussi jouer le rôle de ma maman, sourit-il. Je lui avais demandé un autographe quand j’avais 8 ans et que je commençais les cours de théâtre, et elle avait écrit « Pour Julien, en espérant que tu puisses faire ce métier un jour ». C’est beau et émouvant aujourd’hui de travailler avec elle. »

Pour l’autre pièce du Festival, « Les marchands d’étoile » dont l’action se passe en 1942 pendant la Seconde Guerre Mondiale, Julien a engagé la comédienne Axelle Dodier. De quoi nous faire dire en plaisantant qu’il a pistonné sa belle-fille. Pour ceux qui ne connaissent pas la série « Ici tout commence », Axelle Dodier incarne en effet Kelly, fille de Laetitia (Florence Coste), avec laquelle Zacharie Landiras (Julien Alluguette) est actuellement en couple. ça va, tout le monde suit ?

La transition est ainsi toute faite avec « Ici tout commence », le feuilleton quotidien de TF1 dont les intrigues se nouent au cœur d’une prestigieuse école de cuisine. « J’avais initialement fait un casting pour une autre série mais on m’a dit qu’on me verrait bien dans ce nouveau personnage de chef pâtissier talentueux,  romantique, artiste mais avec une certaine part de mystère. Jouer un rôle récurrent a été une vraie question avant d’accepter, d’autant que le tournage a lieu en Camargue et que je vis à Paris mais je me suis dit que c’était une occasion qui ne se présenterait peut-être qu’une fois, alors j’y suis allé », explique-t-il.

 « Dans un film ou un téléfilm, on connaît d’emblée le début et la fin, poursuit-il. Là, les auteurs écrivent au fur et à mesure, j’évolue avec mon personnage. J’apprends beaucoup c’est très enrichissant. Sans doute qu’un jour, j’aurais l’envie de rendre mon tablier mais j’aurais vécu cette belle expérience. Mon personnage, Zacharie, a déjà connu pas mal d’évolutions, beaucoup de conquêtes aussi (rires). Là, il est en couple avec Laetitia. Florence Coste qui l’incarne est en plus une amie et nous sommes évidemment ravis de jouer ensemble. »

Entre toutes ces actualités, Julien Alluguette effectue aussi parfois des doublages comme dans Avatar 2 ou encore Aladin : « faire passer des émotions rien qu’avec sa voix, c’est un beau challenge », avoue le comédien qui reconnaît que sa vie ressemble  « à une partie de Tetris géante mais ça fait des années que c’est comme ça et c’est tant mieux, je déteste m’ennuyer. Alors je fais en sorte de réussir à jongler avec toutes mes casquettes. »

Celle de comédien est forcément moins lourde à porter : « On ne s’occupe que de sa partition alors que le metteur en scène est un chef d’orchestre. Le jour de la première, par exemple, j’ai toujours la sensation d’assister à l’accouchement d’un de mes enfants mais derrière la vitre, à ce moment où je ne peux plus rien faire. C’est un sentiment d’impuissance terrible mais en même temps c’est très émouvant. Et pour l’instant, toutes les naissances se sont très bien passées. » Vu le talent du « papa » nul doute que la famille va encore sacrément s’agrandir au fil des années.

Julien Alluguette incarne le personnage de Zacharie Landiras dans Ici tout commence. PHOTO ITC/TF1
Julien Alluguette reprend son rôle dans "La vie est une fête" au festival d'Avignon. Photo Frédérique Toulet.

Transgression ne s’interdit aucun rêve

Sortie d'un premier EP, concerts dans des gros lieux : Transgression est en train de vivre des moments incroyables. Photo Bryan Deplanque

La clôture du concert d‘Ascendant Vierge fin mai au Métaphone, une soirée au Nexus en première partie de Hippo and the Jacket début juin, une autre prévue sur une scène alternative du Main Square d’Arras le 2 juillet, Matthias Bailleux, alias Transgression, vit une période incroyable, dans la foulée de la sortie de son premier EP, Phobophobia, de l’electro body music (EBM), sous le label Enlace Record. « J’avais déjà sorti des sons séparément sous différents labels mais là c’est mon premier projet avec un fil conducteur, un début, un milieu et une fin », se réjouit-il.

Le fruit de plus d’un an de travail mais surtout d’une grosse décennie à baigner dans la musique pour ce DJ compositeur de 29 ans, bercé par diverses influences depuis son plus jeune âge : « Ma mère écoutait beaucoup de musique noire américaine, de la funk, de la soul puis j’ai basculé dans le rock et le métal, j’écoutais à fond de balle du Linkin Park, du Rammstein », explique-t-il.

Mais c’est finalement suite à un accident sportif qui l’a cloué chez lui, sans pouvoir marcher, que tout a basculé : « J’étais tout le temps sur l’ordinateur et je suis tombé dans la musique électronique, confie-t-il. Je me suis intéressé à ce que jouaient les DJ. J’ai découvert Gesaffelstein, j’ai beaucoup aimé les atmosphères, les sonorités tranchantes, la noirceur qu’il dégageait, j’ai été happé. »

Les premières platines, les premières soirées, Mathias a commencé à jouer des DJ sets le week-end et s’est laissé séduire par une techno plus industrielle. « Je me suis lancé dans des soirées privées, j’ai commencé la composition avec de la techno industrielle, qui était plus facile d’accès en termes de production alors que l’EBM est beaucoup plus instrumentale ».

à ses côtés, un ami doté d’une très bonne oreille et capable de lui dire si ses sons peuvent être intéressants et sa petite amie qui lui apporte le regard davantage public. « Si j’ai les deux validations, ça veut dire que ça vaut le coup de continuer à travailler sur certains sons », avoue-t-il.

Depuis la sortie de Phobophobia, Mathias a un rythme de vie de plus en plus intense, d’autant qu’il travaille, en parallèle, en tant qu’organisateur de concerts pour la start-up « Click and live », une société qui trouve des artistes pour différents lieux où sont organisés des concerts. Son rêve : vivre un jour de sa musique.

« Phobophobia », disponible,  label Enlace Record. lien d’écoute sur Soundcloud : https://on.soundcloud.com/p83XoZ1jNoe95fCCA 

 

Une programmation alléchante pour le Théâtre du Nord

Après une année exceptionnelle avec 103% de taux de remplissage dont un tiers de moins de trente ans, le théâtre du Nord à Lille se prépare à vivre une saison 2023-2024 tout aussi haletante avec 26 spectacles au programme pour un total de 160 représentations, auxquelles il convient d’ajouter les 130 dates  des six productions maison  (Fées, Dom Juan, Ma couleur préférée, Djamil Mohamed, My Brazza et Le Iench) actuellement en tournée partout en France. Ce qui fait dire à David Bobée, le directeur du Théâtre du Nord, qu’il y aura des spectacles presque tous les jours de l’année.

En cette année marquée par les 20 ans de l’école du Nord, la part belle a été faite aux élèves. On les retrouvera, en alternance, comme cette saison, dans « Fées » du 7 au 10 novembre, mais Pascal Rambert a aussi décidé de leur dédier une création « Seize au centre », du 23 au 27 janvier.

Des créations  de deux anciens élèves seront aussi à l’affiche avec « Extinction » de Julien Gosselin, qui se jouera au Phénix de Valenciennes (un bus partira de Lille) le 18 novembre, mais aussi Némésis de Typhaine Raffier du 21 au 24 mai.

Quelques grands classiques comme Oeudipe roi (11 au 15 octobre) de l’ancien patron des lieux, Eric Lacascade ; Dom Juan de David Bobée (13-19 novembre)  ou encore Caligula de Jonathan Capdeville (14 au 16 mai) figurent dans l’offre 2O23-2024. Tout comme ces moments d’histoire parfois oubliés au cœur de l’Angleterre du XVIIe siècle pour la pièce féministe « Le Firmament » (4 au 6 avril) du Vietnam des années 1950 dans « Saigon » (6 au 10 décembre) ou encore à travers les grandes poésies antiracistes d’hier et d’aujourd’hui dans « Black label » conçu par David Bobée avec Joey Starr (13 au 17 février).

Beaucoup d’autres spectacles mériteraient la citation mais on terminera par deux oeuvres, : « Le jardin des délices » (29 novembre au 1er décembre), en création cet été au festival d’Avignon, et Quatuor Odditty mis en scène par  Virginie Despentes (12 au 16 mars). « Je suis fier de voir tous ces beaux noms réunis dans une même saison, avoue David Bobée. Ils représentent bien le théâtre que j’aime : vivant, populaire, engagé… »

Plus d’informations sur www.theatredunord.fr

Les auteurs de Quatuor Oddity. Photo Arnaud Bertereau
Seize au centre, une création pour les élèves de l'école du Nord. Photo Claire Fasulo